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Sujet: Le second Empire Jeu 24 Mar 2022 - 9:41
1851-1870
Le Second Empire et la France épanouie [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Napoléon III(Alexandre Cabanel 1835 - musée de Compiègne)
Louis-Napoléon Bonaparte, neveu de Napoléon 1er, a conduit les destinées de la France pendant près de deux décennies, du coup d'État de 1851 à la défaite de 1870, durant une période qualifiée de Second Empire (le premier Empire étant celui fondé par son oncle).
Lui-même, en restaurant l'empire, a pris pour nom de règne Napoléon III (le nom de Napoléon II étant réservé au fils de Napoléon 1er, qui n'a jamais régné). D'emblée, il a instauré un régime dictatorial et limité très strictement la liberté d'expression. Mais au fil des années, le régime a évolué vers des formes plus libérales, proches d'un régime parlementaire.
Pendant ces deux décennies, la France va se transformer plus vite qu'à aucune autre époque de son Histoire. Elle va s'ouvrir à la révolution industrielle, se doter d'infrastructures et d'un urbanisme encore en usage, mais aussi jeter les fondements d'un deuxième empire colonial. [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
L'Impératrice Eugénie et ses dames de compagnie (musée de Compiègne)
De l'empire autoritaire à l'empire libéral
Napoléon III prend sans attendre des mesures pour limiter la liberté d'expression de la presse et mettre l'Université au pas.
Au demeurant, la grande masse des citoyens et du peuple se rallient d'assez bon gré, y compris les orléanistes, partisans de la monarchie, et certains leaders républicains sincères, tels Émile Ollivier ou encore l'historien Victor Duruy.
L'empereur y met du sien. Habilement, il consacre sa liste civile à ses relations publiques. C'est la « fête impériale », aux rythmes de la musique d'Offenbach. Avec l'impératrice Eugénie, il anime une vie de cour brillante, aux Tuileries (Paris), à Fontainebleau et à Compiègne, sans oublier les stations thermales et balnéaires créées sous son égide comme Deauville, Monte-Carlo, Biarritz et Vichy.
Cette cour est ouverte à toute la bourgeoisie sans esprit de classe et se montre accueillante pour les gens de lettres. Chacun a droit à une invitation dans le cadre des « séries » qui se succèdent chaque année à Compiègne.
Après le Congrès de Paris et la naissance du Prince Impérial en 1856, le régime est à son apogée. Napoléon III se résout à lâcher du lest. D'autoritaire, l'empire va devenir dès lors progressivement libéral. Les élections de 1869 donnent 45% de voix à l'opposition. Napoléon III en prend acte et appelle au gouvernement Émile Ollivier, le chef du « tiers parti », qui rassemble les orléanistes et les républicains modérés.
Cet empire parlementaire reçoit la caution populaire par le plébiscite du 8 mai 1870 : 7,350 millions de oui , un million et demi de non. La guerre et la défaite de Sedan vont tout emporter et même gommer les acquis incontestables de ces deux décennies...
Révolution économique et sociale [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Au Paradis des Dames, affiche publicitaire, 1856, BnF, Paris.
La société française s'est transformée sous l'impulsion de Napoléon III plus vite qu'en aucune autre période de son Histoire. C'est à cette époque qu'elle a accompli sa révolution industrielle.
L'empereur prend lui-même en main la politique économique et sociale du gouvernement.
Convaincu des bienfaits du libre-échange, il signe en 1860 un traité de libre-échange avec le Royaume-Uni. Il institue aussi une union monétaire, l'Union latine, qui a englobé jusqu'à la Première Guerre mondiale de nombreux pays. Enfin, il accorde le droit de grève aux ouvriers.
Révolution culturelle
Avec son ministre Victor Duruy, l'empereur relance l'instruction publique. [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] Victor Duruy
Paris change aussi de visage. Napoléon III engage à marches forcées la rénovation de la capitale avec le baron Haussmann, préfet de la Seine.
Outre-mer, au Sénégal, au Cambodge, en Cochinchine, en Nouvelle-Calédonie, les troupes marines de Napoléon III jettent les bases d'un nouvel empire colonial que la IIIe République aura à coeur d'étendre.
Le gouvernement impérial voit dans les conquêtes coloniales une occasion de manifester la grandeur de la France.
Déboires diplomatiques
Mais Napoléon III, imbu de principes humanitaires et désireux de faire prévaloir en Europe le «principe des nationalités» (une nation, un pays), mène par ailleurs une diplomatie brouillonne.
C'est ainsi qu'il s'engage aux côtés du Royaume-Uni dans une guerre, victorieuse mais éprouvante contre la Russie, en Crimée. Il intervient aux côtés des chrétiens d'Orient puis entraîne la France dans de graves déconvenues, au Mexique comme en Italie.
Enfin, gravement affaibli par la maladie et poussé de l'avant par l'opinion publique, elle-même manipulée par l'habile chancelier allemand Bismarck, il engage une guerre désastreuse contre les armées de la Prusse et des autres États allemands.
Cette guerre va lui coûter son trône et occulter le bilan de son règne.
mimi1260 Administrateur
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Sujet: Re: Le second Empire Jeu 24 Mar 2022 - 9:59
La guerre franco-prussienne (1870-1871)
Introduction : la guerre en bref
La guerre qui oppose la France au royaume de Prusse et à ses alliés allemands va mettre face à face près de trois millions d'hommes. Bien que brève, elle aura des conséquences dramatiques pour les deux nations et l'ensemble de l'Europe.
L'armée allemande met en oeuvre pour la première fois une artillerie moderne. La France est immédiatement envahie et plusieurs de ses villes sont bombardées. Les soldats allemands subissent en retour des attaques de francs-tireurs et répliquent par des exécutions sommaires...
De l'humiliation ressentie par les Français et de l'arrogance nouvelle de l'Allemagne vont surgir les deux grands conflits mondiaux du XXe siècle. La France et l'Allemagne, qui éprouvaient jusque-là de la sympathie et même de l'attirance l'une pour l'autre, vont désormais se percevoir de façon très exagérée comme des « ennemis héréditaires ». [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Les dernières cartouches, défense de l'Auberge Bourgerie à Bazeilles par le Division bleue, le 1er septembre 1870 (1873, Alphonse-Marie-Adolphe de Neuville, musée de la dernière cartouche, Bazeilles)
Manipulation diplomatique et politicienne
Le drame confronte deux personnalités contraires : le chancelier allemand Otto von Bismarck, tout entier voué à la gloire de la Prusse, et l'empereur Napoléon III.
Bismarck, dès son arrivée aux affaires, a compris qu'il ne pourrait agrandir la Prusse qu'à la condition de neutraliser l'Autriche et la France. L'Autriche lui laisse les mains libres après avoir été défaite à Sadowa en 1866. Il peut ainsi constituer une Confédération de l'Allemagne du Nord. Mais le chancelier aspire à achever l'unité allemande en rassemblant le nord et le sud dans une guerre contre la France. Celle-ci a l'apparence d'une grande nation mais son armée est usée par les équipées coloniales et guère en état de soutenir une guerre moderne. [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Le roi de Prusse Guillaume Ier à Ems le 13 juillet 1870 (Berlin, 22 mars 1797 ; 9 mars 1888)
Bismarck saisit le prétexte d'une « succession d'Espagne » pour l'amener à déclarer la guerre à la Prusse et convaincre les États d'Allemagne du sud de s'unir à celle-ci contre l'ennemi commun. Il y arrive par le caviardage de la dépêche d'Ems, qui déchaîne les passions.
Dans ce 1er acte qui va aboutir en six semaines à la défaite des armées impériales, on est frappé par la prépondérance de l'aléa humain. La maladie (calculs rénaux) est cause de ce que l'empereur cède le 13 juillet au soir à son ministre belliciste et au clan des va-t'en-guerre. Il déclare la guerre le 19 juillet 1870.
La France mobilise 265 000 hommes, sur un front de 250 kilomètres. De leur côté, la Prusse et ses alliés d'Allemagne du Sud en alignent immédiatement près de 600 000. [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Canon Krupp avec chargement par la culasse pendant la guerre de 1870-1871
Six semaines de guerre
Dès le 6 août, une armée française est battue à Forbach et perd la Lorraine. Le même jour, le maréchal de Mac-Mahon est battu à Froeschwiller-Woerth et perd l'Alsace. Le maréchal Bazaine, nouveau commandant en chef, se laisse enfermer dans Metz.
L'empereur, affaibli par la maladie, rejoint Mac-Mahon au camp retranché de Châlons-sur-Marne et tente de secourir Bazaine. Mais l'armée et Napoléon III lui-même doivent finalement rendre les armes à Sedan le 2 septembre 1870.
À Lyon et Paris, le 4 septembre, à l'annonce du désastre, les opposants proclament la République. Le Gouvernement de la Défense Nationale, qui s'est saisi du pouvoir, décide de relancer la guerre pour empêcher les Allemands d'annexer l'Alsace et une partie de la Lorraine.
Léon Gambetta organise à Tours une armée de la Loire. Il réussit à lever et équiper plus de 600 000 volontaires. Mais ses efforts sont annihilés par le manque d'officiers et par la capitulation de Bazaine, plus soucieux de « défendre l'ordre social contre les mauvaises passions » que la patrie en danger. Les masses rurales elles-mêmes ne montrent aucun intérêt pour cette guerre absurde.
De leur côté, affamés par un siège impitoyable de cinq mois, durant l'hiver 1870-1871, les Parisiens tentent dans un effort désespéré une « sortie torrentielle » à Buzenval, le 20 janvier 1871. C'est la fin d'une guerre qui aura pour l'essentiel duré six semaines, de la dépêche d'Ems à la capitulation de Sedan. Relativement meurtrière pour l'époque, elle aura causé environ cent mille morts dans chaque camp. [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Quartier général de troupes allemandes au château de Brunoy, octobre 1870 (Anton von Werner, 1894, Alte Nationalgalerie, Berlin)
D'humiliation en humiliation
Le 18 janvier 1871, le gratin de toute l'Allemagne proclame l'Empire dans la Galerie des Glaces de Versailles. Dix jours plus tard, le 28 janvier, l'armistice est signé pour quatre semaines, le temps d'élire une nouvelle assemblée. Bismarck tient en effet à ce que le futur traité de paix soit avalisé par un gouvernement légitime. [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Batterie allemande face à la citadelle de Belfort
Le 1er mars 1871, les vainqueurs défilent dans une capitale endeuillée et silencieuse. Saturés d'humiliation, des Parisiens proclament une Commune insurrectionnelle. Après sa répressionn est conclu le traité de paix de Francfort.
Ainsi prend fin une période qualifiée avec justesse par Victor Hugo d'« Année terrible ». S'il n'y avait qu'un poème à retenir de cette époque, c'est bien entendu Le Dormeur du Val, un sonnet écrit par Arthur Rimbaud en octobre 1870. Le poète a alors 16 ans...
mimi1260 Administrateur
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Sujet: Re: Le second Empire Jeu 24 Mar 2022 - 14:09
19 septembre 1870 - 28 janvier 1871
Siège de Paris
Impensable ! Deux semaines après la défaite de Sedan, la capture de Napoléon III et la proclamation de la IIIe République, les armées prussiennes atteignent Paris. Le siège de la capitale débute le 19 septembre 1870.
Le même jour, Jules Favre, vice-président du Gouvernement de la Défense nationale et ministre des Affaires étrangères, gagne le château de Ferrières-en-Brie, près de Brie, où le chancelier Bismarck a installé son quartier général. Les deux hommes vont s'entretenir en secret pendant deux jours et le chancelier va faire comprendre à son interlocuteur que la paix devra se payer de la cession de l'Alsace et d'une partie de la Lorraine à l'Allemagne. Ne se résignant pas à cette issue, le gouvernement provisoire va donc relancer la guerre. [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
La queue devant une boucherie municipale pendant le siège de Paris en 1870 (Clément-Auguste Andrieux, musée d'Art et d'Histoire de Saint-Denis)
Paris affamé
Deux millions d'habitants, de réfugiés et de soldats se voient pris au piège à l'intérieur des 33 kilomètres de fortifications érigées sous l'égide d'Adolphe Thiers trente ans plus tôt. 16 forts ceinturent Paris.
100 000 bourgeois ont fui la capitale mais 200 000 banlieusards l'ont rejointe pour se mettre à l'abri. Près de cent cinquante mille soldats réguliers sont aussi venus la défendre, sous le commandement du général Louis Trochu, assistés de deux cents mille gardes nationaux. Ces derniers n'ont, il est vrai, aucune valeur combattive faute d'entraînement. Ils représentent à peu près toute la population masculine en âge de combattre. Ils se voient remettre une modeste solde de 1,50 franc par jour. Elle ne compense pas, pour beaucoup d'artisans et de commerçants la perte de leur revenu du fait de l'interruption de nombre d'activités.
Paris se voit encercler par 400 000 soldats ennemis. Ceux-ci coupent les voies ferrées et sectionnent le câble télégraphique qui emprunte le lit de la Seine. Les assiégés ne peuvent plus communiquer avec l'extérieur que par pigeons voyageurs et ballons dirigeables.
Le jeune maire de Montmartre, un médecin et journaliste de 29 ans qui a nom Georges Clemenceau affiche le 23 septembre 1870 une proclamation à l'attention de ses concitoyens : « Nous sommes les enfants de la Révolution. Inspirons-nous de l'exemple de nos pères de 1792 et, comme eux, nous vaincrons. Vive la France ! Vive la République ! ». Cette référence à la Grande Révolution va nourrir les espoirs les plus fous au sein du peuple parisien, composé pour l'essentiel d'artisans, ouvriers et boutiquiers. Dans le reste du pays, cependant, bourgeois et paysans vont dans leur grande majorité aspirer à faire la paix et tourner la page au plus vite. [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Reddition des francs-tireurs de l'église Saint-Nicolas, au Bourget, le 30 octobre 1870 (1878, Alphonse de Neuville)
Le 7 octobre, le fougueux Gambetta, ministre de l'Intérieur, quitte Paris à bord d'un ballon. Sitôt à Tours, il organise l'armée de la Loire en vue de secourir la capitale et de mener une « guerre à outrance ». Son initiative recueille quelques éphémères succès mais elle inquiète les populations rurales qui aspirent au retour de la paix. Les troupes hâtivement rassemblées par Gambetta vont être sans trop de difficultés battues par les Prussiens.
Pendant ce temps, à Paris, les combattants ne veulent pas rester inactifs. 300 francs-tireurs occupent sans coup férir le village du Bourget, au nord de la capitale. Mais les Allemands lancent une furieuse riposte le 30 octobre et, faute de renforts, les francs-tireurs doivent capituler.
Les Parisiens, déjà éprouvés par un siège impitoyable et un hiver qui s'annonce des plus rigoureux, apprennent la nouvelle en même temps que la reddition honteuse de l'armée de Bazaine, à Metz, le 27 octobre. Ils ressentent avec rage cette trahison et leur impuissance à desserrer l'étau prussien. [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Le dépeceur de rats (image satirique du siège de Paris par Narcisse Chaillou, musée d'Art et d'Histoire de Saint-Denis)
Le 31 octobre, des gardes nationaux investissent l'Hôtel de Ville où siègent quelques membres du gouvernement de la Défense nationale aux cris de « À bas Trochu ! Pas d'armistice ! Guerre à outrance ! » Monté sur une table, le jeune savant et révolutionnaire Gustave Flourens (32 ans) appelle même à la création d'un nouveau gouvernement. Des clubs et des comités révolutionnaires commencent à se former dans la ville et d'aucuns évoquent « La Patrie en danger », manière de rééditer la Grande Révolution 80 ans après.
Pour ne pas donner à l'ennemi le spectacle de ses divisions, le gouvernement promet des élections municipales et celles-ci conduisent à l'election de l'un des siens, Jules Ferry, comme maire de Paris le 15 novembre.
Le calme revient mais les difficultés n'en finissent pas de croître. Les autorités municipales ouvrent des boucheries municipales et dès le 26 octobre, n'octroient plus que 50 grammes de viande par jour à chaque habitant. Cela est encore trop !
Dès le mois de novembre, incapables de mettre en place un rationnement efficace ou de lutter contre la spéculation, elles n'ont plus de viande à distribuer. Les Parisiens se voient contraints d'envoyer à la boucherie les animaux du Jardin des Plantes, les deux derniers étant les éléphants Castor et Pollux, sacrifiés les 29 et 30 novembre. Cette « viande de fantaisie » régale les plus riches. Les autres, moins chanceux, en viennent à manger des rats, vendus au prix de deux francs-or pièce.
Le maire Jules Ferry, en charge du ravitaillement, y gagne le surnom de « Ferry-Famine »... Et voilà le mois de décembre avec des températures de -5°C à -20°C ! Disette et froid vont causer la mort d'environ 40 000 Parisiens. [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]
Canons allemands autour de Paris en janvier 1870
Paris meurtri
Sous la pression de Gambetta, le général Trochu effectue une sortie en force du 30 novembre au 2 décembre à Chamigny. Elle échoue. Une deuxième sortie au Bourget le 21 décembre n'est pas plus heureuse.
Pour ne rien arranger, le roi de Prusse se laisse convaincre par Bismarck de bombarder les forts à partir du 27 décembre 1870 puis la capitale elle-même à partir du 5 janvier 1871. Il s'ensuit la destruction d'un millier de maisons et d'édifices publics, surtout sur la rive gauche, ainsi qu'une centaine de morts et quelques centaines de blessés. Les Prussiens utilisent une nouvelle arme, un gigantesque canon Krupp qui avait été présenté à l’Exposition universelle de Paris, trois ans plus tôt ! Sinistre prélude aux guerres du XXe siècle.
Adolphe Thiers (73 ans), vieux député conservateur doté d'un très grand prestige, entreprend une tournée des capitales européennes en vue d'obtenir une intervention militaire en faveur de la France. Il se heurte partout à un refus poli... au grand soulagement du chancelier Bismarck. Les 10 et 11 janvier 1871, l'armée de la Loire commandée par le général Alfred Chanzy est défaite à la bataille du Mans. Pour la majorité du gouvernement, il est clair, désormais, que toute résistance est inutile.
Pour satisfaire toutefois les meneurs révolutionnaires qui menacent de se rebeller, on accepte le principe d'une dernière attaque. 90 000 Parisiens tentent dans un effort désespéré une « sortie torrentielle » à Buzenval, le 19 janvier 1871, sous la protection de l'artillerie du fort du Mont-Valérien. Elle s'achève par une piteuse retraite. 4 000 hommes y laissent la vie. Le gouverneur militaire de Paris, le général Trochu, démissionne deux jours plus tard en préconisant rien moins qu'une humiliante capitulation. Il restera de lui le mot cinglant de Victor Hugo : « Trochu, participe passé du verbe Trop Choir ».
À Saint-Pétersbourg, le tsar Alexandre II accueille avec une secrète jubilation les nouvelles de France, qu'il avait prévues. Il y voit la rançon de son humiliation dans la guerre de Crimée et des leçons prodiguées par les Français à son endroit à propos de la Pologne.
L'armistice est finalement signé par Jules Favre le 28 janvier 1871 pour une durée de quatre semaines. Bismarck veut ainsi donner le temps aux vaincus d'élire une assemblée nationale. Il a besoin en effet que le traité de paix définitif soit entériné par une autorité légitime afin de ne pas être plus tard contesté. C'est pour Paris la fin d'un siège de 138 jours mais la population cultive l'amertume d'avoir souffert pour rien et d'avoir été trahie...
Dix jours plus tôt, le 18 janvier, les envahisseurs ont proclamé triomphalement l'Empire d'Allemagne dans la Galerie des Glaces de Versailles.
La France aspire à la tranquillité
Le 8 février, les élections générales amènent à la nouvelle Assemblée nationale une majorité favorable à la paix. Les ruraux des provinces, peu au fait du siège de Paris et des événements militaires, manifestent massivement leur volonté d'en finir au plus vite avec la guerre en reportant leurs suffrages sur les notables. C'est ainsi que se révèle à l'Assemblée une majorité écrasante de monarchistes avec 400 députés royalistes, 200 républicains et 30 bonapartistes ! Pas moins d'un élu sur trois est noble ! Mais les députés royalistes sont divisés entre partisans du comte de Paris, petit-fils de Louis-Philippe 1er, du comte de Chambord, petit-fils de Charles X, et de Napoléon III, empereur déchu.
Paris étant entourée de troupes allemandes et trop agitée au goût de l'Assemblée nationale, celle-ci se réunit le 12 février 1871 au Grand Théâtre de Bordeaux. Le gouvernement de Trochu lui remet sa démission et, le 17 février, l'Assemblée désigne Adolphe Thiers comme « chef du gouvernement exécutif de la République française » en attendant de statuer sur la nature du régime futur : monarchie ou république. C'est le « pacte de Bordeaux ».
Ce dédit par rapport aux proclamations du 4 septembre est une gifle pour les Parisiens qui, sur 43 députés, ont élu trente-six républicains hostiles à la paix, dont Louis Blanc, Victor Hugo, Léon Gambetta, Giuseppe Garibaldi, Henri Rochefort, Félix Pyat, etc.
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Sujet: Re: Le second Empire Jeu 24 Mar 2022 - 18:16
18 mars 1871
Paris, de l'insurrection à la Commune
Le 18 mars 1871, une émeute éclate à Paris, sur la butte Montmartre. Adolphe Thiers, chef du gouvernement provisoire de la République, renonce à la réprimer et s'enfuit à Versailles avec tous les corps constitués.
C'est l'amorce de la « Commune ». Maîtres malgré eux de la capitale, les révolutionnaires et militants socialistes et ouvriers vont offrir à la bourgeoisie républicaine l'occasion de se débarrasser une fois pour toutes de la « question sociale ». Il en coûtera 20 000 victimes.
Provocations
À l'automne précédent, après avoir capturé l'empereur Napoléon III et son armée à Sedan, les Prussiens ont assiégé la capitale et le gouvernement de la Défense nationale, qui s'est entre-temps réfugié à Bordeaux, s'est résigné à signer un armistice.
Les vainqueurs se voient accorder le droit de défiler le 1er mars 1871 à Paris, dans une capitale en deuil, devant des statues recouvertes d'un voile noir. Les Parisiens ruminent leur humiliation. Après avoir soutenu un siège très pénible, ils se sentent trahis par leurs gouvernants.
L'Assemblée nouvellement élue et où dominent les monarchistes attise les tensions. Après l'arrêt des combats contre les Prussiens, elle renonce à revenir à Paris et quitte Bordeaux pour... Versailles, la ville royale !
Dès le lendemain, parmi ses premières mesures, le gouvernement lève sans préavis le moratoire sur le remboursement des effets de commerce et des loyers qui avait été instauré au début de la guerre. Il supprime aussi l'indemnité due à la garde nationale (30 sous par jour). Or, à Paris, la garde nationale rassemble pas moins de 180 000 hommes issus de la petite bourgeoisie et du monde ouvrier qui se sont portés volontaires pour défendre la capitale contre l'ennemi et se sont habitués à vivre sous les armes.
L'atmosphère s'échauffe. Thiers décide de récupérer 227 canons financés par les Parisiens en vue de la défense de la capitale. La garde nationale les a disposés sur les buttes de Montmartre et de Belleville pour les mettre hors d'atteinte des Prussiens lors de leur entrée dans la capitale.
Le samedi 18 mars, Thiers envoie une colonne de 4 000 soldats avec l'ordre de les récupérer. On sonne le tocsin. La foule s'assemble. Les soldats se débandent ou se rallient au petit peuple.
Le général Lecomte, qui commande l'une des brigades, est fait prisonnier. Un autre général, Clément-Thomas, qui se promène sur les boulevards, est arrêté à son tour par les émeutiers ; on lui reproche d'avoir participé à la répression de juin 1848. À 17 heures, les deux hommes sont exécutés par la foule.
Des émeutes se produisent au même moment en d'autres quartiers de Paris. Adolphe Thiers renonce à les réprimer. Peut-être juge-t-il l'entreprise trop risquée avec 30 000 soldats à la fidélité incertaine face aux 150 000 hommes de la garde nationale ? Il ordonne donc à l'armée et aux corps constitués d'évacuer sur le champ la capitale. L'évacuation commence avant même le meurtre des généraux Lecomte et Clément-Thomas. Elle est achevée le soir même.
Le Figaro : gare aux hommes malintentionnés, égarés, inconnus, communistes... Dans son édition du 20 mars 1871, Le Figaro dresse heure par heure le récit de la journée tragique qui a vu l'abandon de Paris par les corps constitués. Il publie aussi la déclaration du gouvernement à la population, mettant celle-ci en garde contre « des hommes malintentionnés, sous prétexte de résister contre les Prussiens, qui ne sont plus dans vos murs, se sont constitués les maîtres d'une partie de la ville... »
Voir Le Figaro du 20 mars 1871Voir
Confusion
Abandonné par la République, Paris s'en remet à des militants jacobins nostalgiques de la Grande Révolution (celle de 1789), à des anarchistes, des socialistes et des utopistes. Pris de court par le vide du pouvoir, ces militants au nombre d'une trentaine se réunissent dans la plus grande confusion à l'Hôtel de ville.
Ils organisent des élections municipales le 26 mars mais la majorité des Parisiens s'en désintéressent (229 000 votants sur 485000 inscrits). Il est vrai que beaucoup de bourgeois n'ont pas attendu pour fuir la capitale.
La Commune est néanmoins proclamée dans la foulée des élections le 28 mars 1871. Elle est représentée par une assemblée de 79 élus et son nom fait référence à la Commune insurrectionnelle qui renversa la royauté le 10 août 1792.
La capitale doit dès lors supporter un deuxième siège, non par les Prussiens mais par l'armée française. Il s'achèvera dans la tragédie, avec la Semaine Sanglante, deux mois plus tard. La blessure, jamais cicatrisée, continue de séparer en France la gauche de la droite.